Montréal, le 16 novembre 2016 – Le Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec (RCLALQ) lance sa campagne ‘’La Régie du logement : Assez du deux poids, deux mesures’’ à Québec et à Montréal et urge le ministre Coiteux de réformer le tribunal. «  Le tribunal supposé mettre en œuvre le droit du logement se retrouve plutôt à renforcer les injustices entre locataires et propriétaires. Le fonctionnement de la Régie participe activement au système de deux poids, deux mesures qui pénalise gravement les droits des locataires. Ne soyons pas surpris que de nombreux locataires aient perdu toute confiance envers la Régie », affirme Maxime Roy-Allard, porte-parole du RCLALQ.  

Un déni de justice pour les locataires, un paradis pour les proprios

Le RCLALQ a publié en 2016 une étude approfondie sur la Régie et le constat est clair : le tribunal remplit très mal ses mandats de base. « Non seulement les délais s’allongent pour beaucoup de locataires, mais les préposé-e-s peinent à donner de l’information rigoureuse aux personnes qui souhaitent introduire une demande. De plus, le déroulement souvent complexe des audiences tend à défavoriser les locataires qui sont généralement non représenté-e-s par un-e avocat-e ; la Régie remplit mal son devoir d’assistance envers les parties, surtout celles connaissant moins bien leurs droits. Les frais d’ouverture d’un dossier, soit environ 80$, sont aussi un important frein à l’utilisation de la Régie par les locataires », s’inquiète le porte-parole.

Son plus récent rapport annuel le confirme, la Régie est surtout utilisée par les propriétaires : seulement 13% des causes sont introduites par des locataires.  Les propriétaires se voient aussi offrir une voie rapide lorsque vient le temps de mettre des locataires à la rue pour non-paiement de loyer, soit un délai moyen de 1,4 mois avant la première audience. Le RCLALQ considère totalement inacceptable l’existence d’un tel traitement de faveur. « Les délais d’attente à la Régie reflètent ce système de justice à deux vitesses »,  dit Claire Abraham, organisatrice communautaire au Projet Genèse. « Même une cause très urgente qui nuit à la santé du locataire, comme par exemple un manque total de chauffage, est considérée comme étant moins importante qu’une cause de non-paiement de loyer. On n’évalue pas le préjudice du locataire et du propriétaire de la même façon. Cela reflète le problème structurel de deux poids deux mesures à la Régie ».

Pour Mme Coulibaly, une locataire qui a été forcée à abandonner son logement hautement insalubre, la Régie du logement est devenue une machine à expulser les locataires : « Suivant les conseils d’un préposé de la Régie, j’ai retenu sur mon loyer les frais d’un plombier que j’avais engagé pour effectuer des travaux urgents et nécessaires que mon propriétaire refusait de faire. Il a déposé une demande contre moi, a obtenu une audience en 4 semaines et le régisseur a ordonné de manière expéditive la résiliation de mon bail et mon expulsion, en refusant d’écouter mes explications ». Le cas de Mme Coulibaly est loin d’être isolé. Les comités logement et associations de locataires à travers le Québec viennent constamment en aide à des locataires qui subissent des injustices devant la Régie.

Une grave crise de légitimité

Toutes les critiques s’entendent : la Régie du logement échoue lamentablement à sa mission. Dans les derniers mois, ce sont la Vérificatrice générale et la Protectrice du citoyen qui ont blâmé sévèrement la situation des délais à la Régie. La semaine dernière en commission parlementaire, la présidente de la Régie, Anne Morin, tentait d’expliquer les piètres résultats de son institution devant des députés très sévères à son endroit. Le ministre responsable de l’habitation, Martin Coiteux, a lui aussi affirmé au printemps dernier que les délais sont intenables. « Le ministre Coiteux a confirmé qu’il comptait agir sur le dossier des délais, mais le problème est plus large et les ressources nécessaires se font toujours attendre. Pour l’instant, le ministre se montre tout autant irresponsable que ses prédécesseurs », affirme M. Roy-Allard.